Biarritz – 2005

« L’Art en action »

Le Mur-Art en Action de Biarritz est le résultat d’une démarche artistique collective dirigée par l’artiste plasticienne péruvienne résidant à Paris, Olga Luna, qui a réuni cent personnes provenant de l’association de jeunes des cités Denekin, du centre de loisirs Mouriscot, du foyer maison d’accueil Castillon près de Tarnos et de l’association Valentin Haüy. Après un parcours artistique déjà fécond, qui l’a amenée à produire d’autres murs de masques à travers l’Amérique et la France, c’est la première fois qu’Olga Luna travaille avec des aveugles et mal voyants. En 2002, Olga Luna orchestre un Mur-Art en Action au Pérou avec les enfants des rues de Lima et la maison de Magdalena, qui fonctionne avec des financements suédois à travers l’ONG « Generación, instituto de investigación, promoción y comunicación social », entreprise sans but lucratif vouée à la défense des droits de l’enfant. En 2003, Olga Luna mène un projet identique à Buenos Aires (Argentine) avec cent jeunes de 15 à 19 ans de la municipalité Almirante Brown, en situation de risque social. En 2004-2005, c’est à Sao Paulo (Brésil) qu’elle travaille sur un nouveau mur de masques avec des jeunes pensionnaires de l’association « Associação Beneficiente Santa Fé ».

Le Mur-Art en Action est un projet interactif qui rassemble toujours des participants volontaires issus de milieux sociaux défavorisés et sans expérience artistique particulière. Olga Luna réunit chaque jour 10 à 20 artistes en herbe. Chacun d’entre eux choisit la personne sur le visage de laquelle il pose un enduit huileux sur la partie du visage à découvert avant de faire couler, en présence d’Olga Luna, le plâtre frais qui sèche en 3 minutes. Ainsi est réalisé le « négatif » du masque. Dans un deuxième temps, l’apprenti applique, sans la présence d’Olga Luna, une couche d’argile à l’intérieur du moule en plâtre, sans omettre de ménager une ouverture pour chaque narine. Le « positif » ainsi obtenu doit être imperméabilisé, tout comme la boîte en bois qui doit l’accueillir, et dont les parois internes sont peintes dans une couleur qui rappelle à la fois la chair et l’argile. Après avoir fait couler du plâtre au fond de la caissette de bois, et cette fois-ci en présence d’Olga Luna, l’intervenant dépose le masque en argile dans la boîte, où il se trouve désormais fixé par du plâtre. Le « positif » et le fond de la boîte sont alors enduits de colle, puis recouverts de poudre de pierre de la Rhune. Enfin, l’apprenti perce un trou à l’aide d’une perceuse au niveau des yeux, avant de procéder à l’insertion d’une perle de verre.

L’invention fondamentale d’Olga Luna est de rapprocher l’art de la vie pendant le temps de fabrication du Mur-Art en Action. Ce rapprochement vital et nécessaire trouve son application prioritaire auprès des jeunes et adultes qui évoluent dans des conditions sociales, économiques et culturelles gravement déficitaires. Et tout particulièrement cette partie de la population qui survit tant bien que mal dans les nombreux quartiers sous développés des grandes métropoles latino-américaines et européennes. Olga Luna leur donne la possibilité de s’investir personnellement et collectivement dans un projet artistique qui les transforme en acteurs d’une œuvre d’art, symbole d’une société idéale dans laquelle l’art jouerait pleinement son rôle politique, c’est-à-dire, où l’art serait une initiation dans la voie vers l’épanouissement et la réalisation de soi, pour une société plus juste.

Jean-François Larralde
Septembre 2005